Adossé à la Montagne Noire, le Minervois forme un vaste amphithéâtre exposé au sud, ouvert sur la
vallée de l’Aude et avec la Méditerranée et les Pyrénées pour ligne d’horizon. Ce territoire est constitué d’une mosaïque des paysages : la zone de piémont et de montagne est
terminée par les Causses, orientés vers le sud et entaillés des gorges (c'est chez nous :-). A leur contact, la plaine alluviale couverte de vignes. La vallée de la Cesse et
les causses font partie des paysages
remarquables du Minervois. Ce plateau calcaire et les gorges ont été façonnés par l’eau, qui a produit ce relief karstique typique composé de grottes, de failles, de diaclases
dans lesquelles l’eau s’infiltre et circule sous terre. La Cesse abandonne d’ailleurs son cours aérien dès les beaux jours ! Les Ponts naturels de Minerve sont des monuments
emblématiques et magnifiques de nos
paysages. La rivière suit un cours souterrain sur près de 17kms et reprend son lit aérien à Agel, à la résurgence appelée le Boulidou. Elle se jette ensuite dans l’Aude après
Bize‐Minervois.
Le Minervois est empreint des traces de l’occupation humaine dont les plus anciennes traces connues
remontent à 400 000 ans. Dès l’époque romaine, la vigne est cultivée dans nos régions, allant même à concurrencer la viticulture italienne !
La région a aussi été marquée par la Croisade contre les Albigeois : au XIIe siècle se développe
dans le sud de la France une religion chrétienne différente du catholicisme : le catharisme. La volonté du pape d’éradiquer cette nouvelle croyance a donné lieu à la première
croisade menée dans le royaume de France. Cette croisade se doubla rapidement d’une guerre géopolitique entre les seigneurs du Nord et les seigneurs occitans. Le Minervois a
été impliqué par cette guerre dont la cité de Minerve reste le symbole du premier bûcher collectif de la croisade.
Le catharisme se développe dans la Chrétienté occidentale au XIIe siècle. Cette dissidence chrétienne médiévale réclame, comme d’autres mouvements de
son temps, le retour au modèle d’Eglise primitive des premiers temps du Christianisme. Elle condamne l’Eglise romaine et sa hiérarchie au prétexte de ce qu’elles ne respecteraient pas l’idéal de
vie et de pauvreté du Christ. Sous des noms différents, des communautés de cathares sont attestées à travers toute l’Europe, mais c’est dans le Midi de la France et dans les cités du nord et du
centre de l’Italie
que le catharisme connaît l’accueil le plus favorable et le plus durable. Aux yeux de l’Eglise romaine, les cathares représentaient un danger bien pire que les infidèles (juifs et musulmans),
car, tout en étant chrétiens, ils interprétaient différemment les Ecritures et refusaient la doctrine
des sept sacrements. Leur croyance était basée sur l’existence de deux mondes, l’un bon et l’autre mauvais. Le premier, le monde invisible dont les créatures sont éternelles, résulte de la
création de Dieu le Père ; le second, le monde visible et corruptible, est l’oeuvre du Diable. Introduits dans des corps de chair fabriqués par le Diable, des anges déchus sont devenus les âmes
des hommes et des femmes. Pour les cathares, le christ est uniquement l’envoyé du Père venu porter le message du salut aux hommes. Il n’est pas comme chez les catholiques le rédempteur de tous
les péchés. Du coup, les cathares ne conservent qu’un seul sacrement, celui du consolamentum (consolation) ou baptême d’imposition des mains pratiqué par le Christ, le seul à apporter le
Salut.
la Cité de Minerve et la croisade contre les albigeois : 1210
En 1209, des milliers de chevaliers du nord de la France et de toute l'Europe franchissent le Rhône pour rappeler les seigneurs occitans au respect de la foi de Rome et éradiquer le Catharisme.
L'armée croisée s'attaque d'abord à la tête de la région, le puissant vicomte Raimond‐Roger Trencavel, qui domine une grande part du comté de Toulouse : les vicomtés d'Albi, de Béziers et
Carcassonne. Les croisés mettent Béziers à sac puis Carcassonne tombe. Raimond‐Roger Trencavel est enfermé dans ses propres prisons. Simon de Montfort, à la tête de l'armée croisée, sait que pour
être maître du pays, il doit faire tomber les châteaux vassaux, qui parsèment l'intérieur hostile de la région (Corbières et Minervois). Commence alors la “guerre de châteaux”. Minerve est alors
un castrum, un village fortifié associé à un château. Le castrum et le pagus minerbensis (pays minervois) relèvent du seigneur de Minerve, le vicomte Guilhem. Entouré des profondes vallées de la
Cesse et du Brian, perché sur son rocher, le castrum de Minerve semble imprenable. Au milieu du mois de juin 1210 les Croisés, avec l'appui des Narbonnais, installent leur siège devant Minerve.
Les barons du nord vont exploiter la technique militaire la plus avancée de l'époque, les machines de siège. Quatre trébuchets (mangonneaux et catapultes), construits sur place, entourent et
pilonnent les murs de Minerve. On est au début de l'été sur les causses arides du Minervois. Les deux rivières sont, comme chaque année à cette saison, complètement à sec. Le talon d'Achille de
Minerve est l'accès à l'eau. Son unique puits est situé au pied de la cité à laquelle il est relié par une rampe fortifiée ; il est probablement à
l'emplacement de celui qui est encore visible aujourd'hui (puits Saint‐Rustique). Simon de Montfort réussit à détruire rapidement l'accès au puits grâce à la Malvoisine (la mauvaise voisine), une
catapulte située au‐dessus du puits qui permettait de lancer, non seulement des boulets de pierre, mais aussi, sans doute, des animaux morts qui au bout de plusieurs jours provoquaient des
maladies en pourrissant. Nous sommes autour du 20 juillet, et Minerve qui résiste depuis cinq semaines, à bout de vivres17, n'a plus alors qu'à capituler. Guilhem de Minerve sort négocier pour
sauver sa population et sa cité. Finalement il est conduit à céder et à se rendre sans condition. Néanmoins Simon de Montfort promit de laisser la vie sauve à la population et même aux parfaits
cathares (s'appelant bonshommes on Bons‐Chrétiens), qui s'étaient réfugiés dans la cité avec la prise du bas‐pays, s'ils abjuraient leur foi. Malgré de fortes pressions, pendant que l'on
préparait à leur intention un bûcher, tous sauf trois femmes sauvées
de justesse. Ainsi, ce sont environ 140 parfaits qui périssent sur ce bûcher. Les autres cathares qui ne sont pas “parfaits”, terrorisés, abjurent et ont la vie sauve. Guilhem reçoit alors de
Simon de Montfort des terres du côté de Béziers ; Simon, lui, laisse sur place une petite garnison et repart poursuivre son oeuvre dans les Corbières. On sait que par la suite, Guilhem puis son
fils vont reprendre la lutte aux côtés de la résistance occitane.